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Azrakn°7: Interculturalité, spatialisations et dynamiques sociales :
Samedi 19 mars 2005
Synthèse des interventions de la soirée du 18mars

Interculturalité, spatialisations et dynamiques sociales : Habib Tengour

Débat animé par Anne-Marie Vaillé.

Anne-Marie Vaillé Présidente de séance.

Synthèse des interventions de la soirée du 18 mars et amorce du débat : Marie-Jo Blot.
On va essayer de brosser à grands traits une synthèse des interventions d'hier soir et des contributions écrites. Notre classement n'a pas été aussi simple qu'on l'imaginait. Ces interventions venaient de trois domaines : le domaine professionnel, le domaine associatif, et le domaine religieux, cultuel. Mais on s'est aperçu qu'on peut-être professionnel dans une association, du coup notre belle harmonie est un peu rompue... Du domaine professionnel, on a entendu des interventions d'éducateurs de rue travaillant dans un milieu associatif, et de l'Éducation nationale ; on n'a pas entendu l'intervention de l'orthophoniste-thérapeuthe, dont on a un texte dans le cahier des contributions écrites. Du milieu associatif, on a entendu Génération Femmes et le Club Unesco du lycée de Montgeron, et l'on a une intervention écrite à propos de l'animation du groupe de parole de femmes à Saint-Exupéry, à Montgeron. Enfin dans le domaine cultuel, l'intervention concernant les rapports entre le diocèse d'Evry et les musulmans, le dialogue islamo-catholique. Un certain nombre de difficultés ont été soulignées : difficultés structurelles liées aux institutions, au fonctionnement des institutions dans lesquelles les uns et les autres étaient acteurs, des difficultés liées aussi à des représentations ou des préjugés qu'une communauté peut avoir à l'encontre d'une autre, préjugés de tout bord avec une tendance à la radicalisation de certains points de vue.

Ainsi on a fait part de certains durcissements dans la communauté catholique, dont on parle pudiquement, qui font pendant à un certain durcissement qu'on observe aussi du côté des musulmans. J'ajouterai un certain durcissement également du côté des laïques. Difficulté dues en particulier à la gestion des héritages, héritages historiques, au niveau de l'Histoire, avec un grand H, mais aussi au niveau des histoires personnelles, et puis des héritages culturels des uns et des autres.

A ce propos on a observé que lorsqu'on parle d'interculturel, spontanément on pense aux relations entre les groupes, entre des pays ou des ethnies, mais qu'il pouvait s'agir tout aussi bien de chocs entre générations, que de chocs entre le monde de la rue et la société ordinaire, les jeunes de la rue sont dans une position de contestation de la société telle qu'elle est

Face à cela, des réponses recueillies. On a relevé des points communs : ils concernent les conditions d'écoute, la nécessité de donner la parole. Essayer d'amener à écouter et non pas juger ; provoquer des réunions avec des intervenants ; développer des projets communs, un vécu commun.

A la suite de cela, ont été posées beaucoup de questions, en particulier des questions tournant autour du "comment"; comment en arriver à proposer quelque chose ? Une réponse valable au lycée, par exemple, est-elle valable ailleurs ? On s'est posé aussi la question d'une certaine illusion, peut-être, qu'on peut se faire de l'interculturel. A écouter tout le monde, hier, on a eu l'impression que l'interculturel c'était facile. Bien sûr, chacun a fait état de ses difficultés, mais il nous semble important de réfléchir au passage entre un premier niveau d'échange qui permet de connaître et de se reconnaître mutuellement, et une démarche de rencontre et de dialogue en profondeur. On a eu un peu l'impression que, souvent, ce qui nous faisait défaut c'était la capacité à quitter un mode superficiel de la connaissance mutuelle, de l'échange ; d'où, question : comment faire pour que ceci entre réellement en chacun et dans les cultures ?

Puis, la question de la durée a aussi été posée. Certains ont fait état de la difficulté qu'ils pouvaient avoir à ce sujet, quand ils avaient organisé quelque chose vis à vis des migrants, par exemple, qui sont extrêmement mobiles. Donc, un travail interculturel en profondeur ne se fait pas, semble-t-il, dans l'éphémère, et pourtant on a quelquefois affaire à un public qui est, lui, dans l'instabilité, le passage. Comment faire, alors, lorsqu'on a des données sur lesquelles on a aussi peu de prises ?

Anne-Marie Vaillé.
Nous retenons qu'il y a à surmonter des préjugés et –question archi-fondamentale: que fait-on de nos héritages individuels quand on veut les mettre en commun ? Dans les réponses, il y avait un peu d'angélisme, consistant à dire : "On est tous heureux de se rencontrer." C'est bien, mais peut-on se contenter de cette chose ? Peut-on mesurer ce que ces rencontres auront d'effet réel ? Le problème de la durée est effectivement un défi.

Michel Séonnet.

La question des réseaux a retenu mon attention.

Anne-Marie Vaillé.

C'est la piste déterminante qui est apparue hier soir : mettons en synergie les ressources pour arriver à avancer plus vite et mieux. Tout le monde l'a dit. Il semblerait que c'est un peu l'état d'esprit du moment. Entre le pessimisme ("Nous n'avançons pas") et l'optimisme ("Il se fait plein de choses partout"), il y a cet espace-là, fondamental ; il se fait des choses partout mais on ne sait pas les utiliser parce qu'on ne sait pas les mettre en lien et en cohérence, et il n'est pas vrai que nous n'avançons pas.

La parole est maintenant à notre invité, Habib Tengour.


Interculturalité, spatialisations et dynamiques sociales : Habib Tengour.

Je suis ethnologue, je travaille sur les phénomènes d'interculturalité, sur lesquels j'ai un enseignement. J'enseigne la sociologie à l'Université d'Evry, l'anthropologie à Paris VII. Je suis aussi écrivain. J'ai longtemps travaillé en Algérie sur les espaces culturels traditionnels. En France, j'ai mené des enquêtes sur les banlieues et quartiers difficiles, puis, sur les vieux Maghrébins retraités (les "Chibanis"), dans les foyers. Mon dernier travail, avec le photographe Olivier de Sépibus, a donné lieu à une publication, « Retraite » (Ed. Le bec en l’air) ; il se situe au carrefour de l'ethnologie et du littéraire).
Le travail sur la culture m'intéresse ; l’interculturalité est une des entrées qui renvoie à l’identité et l’identité suppose un travail sur la mémoire. L'interculturalité est une notion assez récente, elle n'est pas présente dans les dictionnaires. Elle est apparue en Europe à partir des années 80.
Dès le départ, c'est une notion qui se veut opératoire, elle n'est pas liée à l'intervention des chercheurs fondamentaux mais au travail sur le terrain, à l'action, et aux mesures à trouver pour régler des situations ponctuelles.
L’interculturel à partir des années 80 devient en quelque sorte un moyen pour régler les problèmes liés à l’intégration. On ne va plus raisonner en termes d’intégration et d’assimilation trop connotés politiquement mais on va utiliser le terme apparemment plus neutre d’interculturel.
Par contre, la notion mise en avant par les anthropologues depuis les années 30 est celle d'"acculturation" ; cette notion venait des USA, de l'Ecole culturaliste américaine. Elle est mise en vogue en France vers la fin des années 70 et pendant les années 80.
Vous trouvez en fin du cahier à votre disposition la définition classique de la culture de Burnett Tylor, c’est celle sur laquelle tous les anthropologues ont travaillé. Cette définition renvoie à tout ce que regroupe la culture pour les anthropologues, c'est-à-dire « Toute la production de l'homme… » .
Elle diffère de la conception beaucoup plus restreinte de la culture qui a opposé la France et l’Allemange dans le Kulturkampf au 19ème siècle, où étaient opposées la « civilisation » (représentée par la France), c’est la technique, la technologie, le raffinement et la « culture » (représentée par l’Allemagne), ce sont les productions de l’esprit, le sérieux, etc.
Mais en dehors de ce moment-là, pour les anthropologues en général, la culture regroupe tout ce qui est produit en société ; la culture englobe le social et non pas l'inverse. Le social est partie intégrante de la culture, ce qui veut dire dans l'optique culturaliste, que c'est la culture qui va déterminer le comportement des individus. Et à partir de là si on doit agir sur un groupe, on doit agir sur les traits culturels pour pouvoir transformer ses pratiques. Agir pour transformer la société, c'est d'abord agir sur la culture . Cela c’est depuis que l’école américaine s’est constituée, d’abord avec Franz Boas (1858-1942) et surtout ses disciples qui sont beaucoup plus connus, Margaret Mead, Ruth Benedict, Ralph Linton…Ils ont tous travaillé sur la culture ; il y a deux courants :
- culture et histoire,
- culture et personnalité.

Le premier s'intéresse aux phénomènes historiques de diffusion de la culture. Il cherche à comprendre comment les aires culturelles se propagent, comment elles se constituent dans un environnement écologique particulier, etc. Alfred Kroeber représente ce courant. La culture n'est pas innée mais acquise, elle n'est pas individuelle mais collective. On ne peut parler de la culture d’un individu : une culture s’élabore en groupe dans la durée et elle n’est pas spontanée, elle est transmise, acquise. Tout est culturel puisque tout est élaboré socialement, et tout se transmet. La culture se situe dans une histoire donnée, chaque culture a sa spécificité liée à son contexte historique, à la façon dont elle s’est développée. Cela, c’est le courant culture et histoire.

Le second courant -culture et personnalité- met l'accent sur le fait que le comportement et la psychologie des individus se configurent à l'intérieur d'une personnalité culturelle collective. C’est la culture qui configure les personnalités des individus ; Selon que les cultures sont plus ou moins complexes, elles permettent l'expression de plusieurs types de personnalités : cela renvoie au "patron culturel" – au "pattern", en anglais- de Ruth Benedict. Le « patron » modèle les individus ; l’individu apprend ces modèles en famille, à l’école, dans le jeu, dans les divers lieux de socialisation du groupe. Ainsi l’enfant intègre ces patrons et il peut alors se projeter dans tel ou tel modèle.
Selon Ruth Benedict, (sa vision renvoie en cela à la philosophie nietzschéenne..), il y aurait deux grands modèles de cultures : celles qui sont douces, pacifiques, harmonieuses, qui adoptent ce qu'elle appelle le modèle apollinien, et celles qui vont inciter à la violence, à l’agressivité, au désordre ; la personnalité est dite alors "dionysiaque". Elle a travaillé sur les indiens kwakiutl, les indiens navajo et pueblo. Elle rend compte de son travail dans un ouvrage qui a eu un grand succès : Patterns of culture qui a été traduit en français par Echantillons de civilisation.
Quant à Margaret Mead, qui a travaillé en Océanie, elle va encore plus loin ; pour elle tout est culturel ; même les notions de masculinité et de féminité n'existent pas en soi, ce sont des acquis culturels ; selon l'éducation qu’elle aura reçue, la femme sera donc gentille, douce ; elle s'occupera des enfants.. mais ce n'est pas partout comme ça…Je n'entre pas dans ces débats de l'école américaine

Cette Ecole US insistait sur l’importance de la culture. Les USA étant une société de migrants, les phénomènes étudiés sont des phénomènes d'acculturation. Le modèle d'intégration US n'est pas un modèle unique ; il offre des possibilités très larges de vivre dans des communautés fermées, sous réserve d'avoir en commun quelques points : le système libéral, la langue, etc., qui sont un dénominateur commun très large.
Très tôt, les chercheurs US se sont posés la question : "Comment se fait l'acculturation ? est-elle subie ? recherchée ? L'acculturation se fait–elle de façon pacifique ou agressive? " Les situations sont multiples et variables ; si l'on vous contraint ou si vous êtes opprimés comme cela est le cas pour les indiens obligés de vivre dans les réserves, l'acculturation est alors subie. Par contre, pour un migrant qui vient avec un projet de migration et qui veut s'installer, l'acculturation sera recherchée. On a là-dessus d'énormes travaux dont l'un des premiers de l'école de Chicago de Thomas et Znaniecki qui étudie comment se passe l'intégration de paysans venus de Pologne et "largués" aux US.
Quand les anthropologues américains travaillaient sur la culture, ils partaient de deux postulats :
1. La culture est composée d'un ensemble de traits liés entre eux par des actions et interactions réciproques, qui peuvent relever de l'économique, du politique, du religieux (laïcité, etc.),… Il faut étudier la configuration des traits culturels .
2. La culture domine le social, ce qui veut dire que :
- la modification des structures, des institutions n'aura pas d'effets importants ;
- il faut d'abord modifier le système des valeurs pour que les changements structurels de l'institution soient efficients ; Si l'on n'a pas au préalable modifié l'ensemble des valeurs, si on ne fait pas bouger les mentalités, les représentations sont déterminantes ; si on veut transformer les structures ou les institutions, sans changer les états d'esprit, les mentalités, les représentations, on n'a rien fait.
C'est par exemple, ce qu'on a fait dans certains pays quand on a voulu changer les habitudes de consommation alimentaire pour rapprocher certaines populations de la culture occidentale.
Autre exemple, dans les années 60, les assistantes sociales entraient dans les HLM, et apprenaient aux travailleurs immigrés comment utiliser la salle de bain, (ce n'était pas un endroit pour élever les poules!)...
Progressivement, on aura des actions liées aux comportements.
Toutes ces données liées à la culture, et la façon d'intégrer les gens, poussent à la mise en place de mesures jouant sur des individus, ce sont des mesures qui agissent sur des comportements individuels. Ce n'est jamais une culture qu'on a en face de soi, ce n'est jamais la culture arabe, la culture judaïque ou la culture chinoise qu'on a en face de soi, ce sont des individus : il s'agit de faire que les gens soient dans le groupe, de les y faire entrer par des mesures qui auront un effet sur le comportement des individus. Il ne s'agit pas de mesure abstraites, elles portent sur l'apprentissage de la langue, sur la façon de s'alimenter, d'habiter …
En France, jusque dans les années 60, ces théories US n'ont pas été prises en considération. Les théories holistes primaient en France sur les théories individualistes. Selon les théories holistes, ce sont les structures, les institutions qui déterminent le comportement des individus. Le fonctionnalisme et le marxisme représentent ces théories holistes. Comme les structures sont considérées comme plus importantes que les comportements individuels, on va agir sur elles, on agit sur les structures économiques, sur les structures politiques, pas directement sur le culturel, celui-ci était secondaire ; le changement des représentations suivra.
Après 1968, qui est peut-être le dernier point culminant de l'utopie holiste, (on pensait pouvoir changer la société du tout au tout), les problèmes économiques deviennent de plus en plus insolubles.
En outre, après 70, des populations, invisibles jusque là, deviennent visibles : ce sont les populations maghrébines, et africaines, elles étaient jusque là invisibles parce qu'elles étaient dans l'empire colonial. Elles pouvaient partir, venir, on les voyait comme coloniaux, puis comme travailleurs migrants.
Mais après les indépendances, l'émigration a continué et même fortement. Après les années 70, les populations ne retournent pas chez elles, contrairement au mythe et aux idéologies qui prévalaient jusque dans les années 70 avec la théorie de la "noria" ("ça tourne" = les migrants viennent et s'en vont, dans ces années là, il y avait de nombreux va et vient entre l'Algérie et la France etc…)
Mais à partir de 1973, les frontières se ferment, ainsi que l'immigration officielle (30 000 personnes par an jusqu'alors). Puis il y a les regroupements familiaux, des naissances sur place…
Vers les années 80, à l'école et ailleurs commencent à se manifester les problèmes des jeunes, du chômage.
Que se passe t-il ? Ces populations ne "s'intègrent pas", ou ont des difficultés d'intégration. On va dire alors que ces difficultés relèvent du culturel
Les explications marxistes, à l'échelle globale de la société ne sont pas opérantes. Les théories culturalistes US gagnent du terrain à l'université, dans le même temps l'enseignement de la sociologie marxiste reflue. Ces idées placent le culturel au premier plan ; on privilégie la notion d'intégration par la culture.

Les problèmes d'interculturalité comportent plusieurs dimensions, celle qui m'intéresse, c'est celle de l'interculturalité liée à l'intégration de populations de cultures différentes, l'intégration de populations maghrébines et africaines.

Mais il ya aussi l'interculturalité liée au management, depuis la fin des années 90, en rapport avec la délocalisation des entreprises ; des entreprises japonaises s'installent en Europe, le management européen, japonais, coréen, n'est pas le même, et on parle alors d' une interculturalité du management.
Le développement de l'informatique va aussi développer un autre axe, celui de la "communication" où l'interculturel est important.
Mais interculturalité-management d'une part et interculturalité et informatique-communication d'autre part sont deux aspects qui touchent des cultures qu'on va considérer comme "partenaires".
Tandis que "l'interculturalité" liée à "l'intégration" touchent des cultures exotiques, exogènes, "indigènes", des cultures que pour lesquelles on n'a pas beaucoup de considération. L"interculturel" devient un euphémisme pour parler des problèmes d'intégration. Au lieu de parler d'intégration-assimilation, ces mots qui sont durs ou difficiles et renvoient à d'autres réalités, on va penser "interculturalité".
On va chercher dans l'interculturel non une réflexion réelle sur la culture de l'autre, une approche de la façon dont les cultures vont s'échanger à l'école par exemple, mais beaucoup plus un certains nombre d'instruments ou d'outils capables de régler des problèmes ponctuels : des problèmes liés à l'apprentissage de la langue, des problèmes liés à la ségrégation spatiale, des problèmes liés à l'espace public, celui de la laïcité notamment puisque le voile va être un problème important, le plus compliqué étant celui de l'intégration de l'espace musulman en France.
Les explications avancées pour comprendre l'intégration des populations espagnoles, portugaises, polonaises, italiennes…dans l'espace français, tiennent à ce que ces populations sont dans la culture occidentale. On voit aujourd'hui des travaux comme ceux de Samuel Huntington qui parlent du choc des civilisations, du choc des cultures. "L'autre", pour nous, c'est celui qui est en face de la Méditerranée, c'est l'Islam, qui est revu avec tous les fantasmes anciens.
Les difficultés d'intégration seraient liées aux structures sociales archaïques et à la religion.Voilà comment le problème est posé.

En réalité, l'interculturel est à situer dans le rapport Orient-Occident. Si on devait réfléchir à l'interculturalité ce serait dans la relation de la culture musulmane avec la culture occidentale.
Ou bien, c'est là une notion qui ne veut rien dire, ou bien il y a toujours eu de l'interculturalité ; en effet il n'existe jamais de culture originelle, toute culture est déjà traversée de "l'autre".
- Les Romains, par exemple, s'approprient la culture grecque après avoir vaincu les grecs.
- Le Christianisme est une religion qui vient du monde hébraïque, un schisme apparaît dans la religion judaïque, ses adeptes s'installent en Europe, en Occident; c'est aussi une interculturalité.
- L'Islam, lui-même prend du judaïsme du christianisme, il s'exporte de l'Arabie vers le bassin méditerranéen.
Le bassin méditérranéen est une zone d'interculturalité depuis la plus haute antiquité, l'interculturalité y a été basée sur le commerce et la guerre.
L'Islam s'affirmant, un des lieux de l'interculturalité, et on le reprend aujourd'hui, c'est l'Andalousie, un modèle plus ou moins mythique, la réalité devant être moins idyllique, mais peu importe, l'identité relève à la fois du réel et du mythe. Dans la quête de l'identité, on choisit ses mythes ; et ce moment mythique où chrétiens, juifs et musulmans conversaient dans des cénacles en Andalousie nous montre que les gens ont toujours discuté entre eux .
Les Croisades ont été aussi un grand un moment d'interculturalité, celui où la chrétienté découvre l'Islam, le raffinement oriental, la liberté des femmes.
Au XVIème siècle, c'est l'inverse. Quand la Turquie ayant pris Constantinople va jusqu'à Vienne, cela amène le déplacement de la capitale de l'empire musulman de Bagdad et du Caire vers Constantinople ; On est passé d'un califat à un autre mais le premier califat ottoman d'Istanbul sera plus tourné vers l'Occident que vers l'Orient. Et progressivement les modes de vie de l'Occident, sont introduits à la cour. On y réétudie aussi les textes anciens, grecs....
Pendant longtemps, la Turquie aura été le grand allié de la France. En France, les philosophes des Lumières utilisent l'Orient pour critiquer l'intolérance de l'Eglise, le pouvoir politique…L'Orient sera longtemps une métaphore pour permettre de l'intérieur la critique de l'Occident.
Dés que la France et l'Angleterre passent à l'ère industrielle, il y a le besoin de conquérir des marchés, et les marchés qui étaient juste en face et à côté, ce sont les pays musulmans. Les premières conquêtes couvrent l'Egypte, l'Inde, le Proche Orient, le Maghreb dés la fin XVIIIéme -début du XIXème siècle. Les pays du Maghreb, au XIXèmesiècle, sont des pays d'Orient confrontés aux pays d'Occident.
L'arrivée de Napoléon en Egypte avec les imprimeries … entraîne de la part de Mehemet Ali une campagne de "modernisation". On voit à Paris, les premiers étudiants égyptiens, dans les années 1830. On a un des premiers textes arabes de ce qu'on a appelé la "Renaissance arabe" (la Nahda), celui d'un cheikh, c'est-à-dire d'un Imam, une sorte d' "aumonier" des étudiants. Le Cheikh Rifaa Tahtâwi a résidé à Paris de 1826 à 1831 ; il décrit la capitale française avec un regard très tendre, ce texte est paru chez Sinbad ; il y décrit les gens de Paris, un bal. Il n'y a absolument pas la vision que l'Occident serait un lieu de perdition, de vice, que la femme dévoilée serait indécente, etc…, comme on le verra plus tard chez les intégristes.
En Egypte, on ne porte pas de jugement de valeur, négatif et violent, à l'encontre des étudiants égyptiens qui viennent étudier en France. Mais l'Egypte n'était pas encore dominée.Il n'y a pas encore l'expérience coloniale.
Cela nous renvoie à ce que des sociologues et ethnologues français, Balandier et d'autres, mettent en avant quand ils abordent les problèmes culturels. Ce n'est pas le point de vue culturaliste proprement dit, mais ce qu'ils appellent la "situation culturelle", c'est à dire la situation sociale du contact entre les cultures. On ne peut appréhender le phénomène interculturel, si on ferme les yeux sur cette situation de contact. Si c'est une situation coloniale (cas de l'Afrique) , celle-ci est autant vécue à l'intérieur des pays, après leur indépendance, -puisque le processus d'acculturation se continue dans ces pays-, que chez les migrants issus de ces pays, puisque leur intégration dans les métropoles des pays européens, est liée à la fois à leur situation historique individuelle et à la relation que ces pays ont entre eux. Par exemple, on ne peut parler de l'intégration d'un congolais en France, ou d'un algérien en France sans tenir compte de la relation de la France avec le Congo ou avec l'Algérie. On pourrait discuter ensemble de ce papier qui vient de sortir, écrit par les "Indigènes de la République".

PAUSE

 

 

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